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« En fermant la frontière, le Nigeria a renforcé la contrebande »

L’économiste John Igué estime que le Bénin et le Nigeria, compte tenu de leur interdépendance, « n’ont pas d’autre choix que de s’entendre ».


« En fermant la frontière, le Nigeria a renforcé la contrebande »

Le 20 août, le président nigérian, Muhammadu Buhari, a annoncé la fermeture progressive des frontières de son pays avec ses voisins. Principal visé : le Bénin, dont les marchands frontaliers sont accusés d’acheminer au Nigeria  des milliers de tonnes de riz par an et de s’y approvisionner illégalement en carburant. Pour mettre fin à la contrebande, les autorités nigérianes ont interdit les importations de denrées alimentaires et renforcé le contrôle des frontières.

Selon l’économiste béninois John Igué, qui dirige le Laboratoire d’analyse régionale et d’expertise sociale à Cotonou, la situation doit aboutir à une remise à plat des relations commerciales entre les deux pays. Cet ancien ministre de l’industrie et des PME, auteur de l’ouvrage Les Activités du secteur informel au Bénin. Des rentes d’opportunité à la compétitivité nationale (éd. Karthala, 2019), revient sur les dynamiques économiques entre le géant africain et son voisin béninois.

Déjà en 2015, le président Buhari avait interdit les importations de riz au Nigeria, avant de les rétablir quelques mois plus tard. Pourquoi reconduit-il cette mesure ?

Il y a deux raisons majeures. La première est que M. Buhari subit la pression des hommes d’affaires nigérians. Il y a quelques années, le Nigeria a mis en place un vaste programme de développement de sa production de riz, géré notamment par Aliko Dangote, l’homme le plus riche d’Afrique. Or le riz importé du Bénin, qui l’importe lui-même d’Asie, est moins cher et fait baisser le prix à la consommation. Cela ne permet donc pas aux producteurs locaux de rentabiliser leurs coûts de production, ni au Nigeria d’atteindre son objectif d’autosuffisance alimentaire. La deuxième raison est que le riz qui vient du Bénin est souvent de mauvaise qualité sur le plan nutritionnel, ce que les Nigérians ont de plus en plus de mal à tolérer.

Samedi 7 Décembre 2019
La Rédaction / Samboudiang Sakho